Bonjour, vous êtes en direct avec l’atelier des couleurs, sur Radio Thérapie.

Nous allons aujourd’hui évoquer la synesthésie, cette nouvelle pandémie qui touche surtout les lieux culturels clos.

La semaine dernière nous avons parlé de la pandémie numérique qui tend à remplacer les mots par des chiffres, voici maintenant la synesthésie, qui, après le Corona, ravage nos neurones en démultipliant leurs connexions et qui substitue aux mots, des couleurs, des sons, des odeurs, que sais-je encore !

- Je passe de suite la parole à notre premier auditeur.

- Ce n’est pas une question mais une protestation que je porte ; vous, les élites vous perdez tout sens de la mesure, la coupure avec le peuple devient évidente. Avec ces sujets abscons, et je reste poli, y a de quoi remettre le gilet jaune ! Avant que le prochain ne nous assomme définitivement ! (pourquoi pas les couleurs du désastre dans la distanciation sociale ?)

- Un autre auditeur, s’il vous plaît ?

- Bonjour Je m’appelle Blanchette.
Moi je pense que vos présentations liminaires sont redondantes et inutiles ; qui lit ces préfaces, introductions, avant-propos, mises en garde, avertissements. Ils sont souvent plus longs que le corps du texte lui-même et dissuadent, parfois même, de le lire.

- Excusez-moi Grisette, vous avez le droit de ne pas aimer les préliminaires mais ne gâchez pas le plaisir des autres, vous avez-vous-même largement dépassé votre temps de parole. Merci tout de même de ces remarques positives parce qu’éclairantes et revenons à notre sujet du jour.

- Bonjour je m’appelle Gérard Rouget

- et vous êtes de ?

- De Lille mais j’habite Marseille. Voilà, j’ai perdu saveur et odorat, est ce que je peux encore chanter des confiteor et d’envoûtantes javanaises ?

- Bonjour je m’appelle Jeanne

- et vous êtes de ?

- De Do Ré Mi où se tient un festival de musique de chambre en plein air. Est-ce que vous croyez que je pourrais me rendre à Orléans et à Rouen pour la suite de mes concerts ?

- Bonjour je m’appelle Robert et avec Larousse nous avons longtemps porté l’ambition d’une culture authentique; alors que maintenant tous les wikiadit, wikiafait, c’est du pipeau pour les gogos ; la preuve, ils écrivent cinéstasi, avec comme définition « police culturelle des mœurs» !

- Je vous rappelle Robert que pour cet échange vous utilisez le serveur numérique Orange et pas le support papier !

- Bonjour, je suis de Saint Cloud, le village aux nuages mémoriels, je voudrais éclaircir le sens de cette phrase énigmatique tracée sur une porte des toilettes municipales : «La terre est bleue comme une orange, rendez-vous à 17h» et c’était signé le rouge sans le noir !

- Il s’agit sans aucun doute d’une publicité pour un opérateur numérique, pour le reste...

- Nous prenons toutes les questions à la suite et nous y répondrons en fin d’émission.
Une dernière intervention, je vous prie.

- Voilà je suis Albert, belge une fois, membre de l’Oulipo et je resterai un poli parfait, moi.
Je rejoins le premier auditeur qui s’insurge contre ce mépris culturel de classe affiché par beaucoup de médias.
Alors que pouvons-nous faire ? Et bien prendre au pied de la lettre ces oukases, les prendre au mot si vous préférez. Et démontrer par-là, l’absurde de cette politique langagière et technocratique du mépris.
J’espère, qu’en France, vous avez abandonné les écrans noir et blanc et êtes enfin passés à la couleur. Car vous allez en avoir besoin pour me comprendre !
Je m’adresse également aux jeunes casqués pour leur signaler que la couleur passe mal par le canal audio.

Commençons par une histoire, beige, authentique, parce que vécue :

« J’habitais à l’époque à Anvert, ayant quitté Liège à cause des trop nombreux bouchons.
Je roulais ce jour-là en Citron, ayant un peu trop abusé du jaune. J’arrive à un carrefour tenu par un casque bleu.
Je passe au feu rouge et me fais stopper. Vertbalisation immédiate.
Je proteste : « Monsieur, je suis passé au vert, dis-je, car à Anvert tous les feux sont à l’envers. Les rouges sont verts.
Et réciproquement ».
J’ai finalement écopé d’une modeste amande. Croquante et bien parfumée, mais, hélas, sans chocolat noir ».

- Merci de votre attention pour ces moments intenses de culture bienveillante.
Et puis, voyez-vous, l’ambition qui nous porte avec ces thèmes, si injustement décriés, vous va, à tous, si bien au teint.
Que vous soyez rose ou réséda.

 

Francis
Mai 2020

 

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