L’air était moins frais,
les parfums se réveillaient,
les couleurs aussi refaisaient surface.
Les ailes agitées des insectes, les chants des oiseaux, la vibration douce des nouvelles pousses dans les branches ravivées se faisaient à nouveau entendre.
On devinait les nids fraîchement aménagés, la vie qui grouillait à nouveau au cœur des haies ou au fond des ruches...
Mais où étaient les hommes ?
Etaient-ils punis de printemps ?
Leur respiration devint courte et les promenades furent limitées pour n’avoir respecter cet écrin qui leur avait été confié !
Confinés dans leurs abris et hôpitaux, ils étouffaient, toussaient, pendant que le Terre reprenait enfin son souffle.
L’appât du gain, le prélèvement de toutes ses ressources pour qu’elles partent en fumée avait rendu l’air vicié.
L’impétuosité de l’ homme, son imprudence, son insolence, son dédain, sa prétention battait en retraite, courbait l’échine face à cet infiniment petit.
Il le mettait à l’écart de la symphonie du printemps, à genou, en soumission à sa couronne.
Il avait fallu un rappel à ceux qui croyaient détenir le pouvoir, oubliant celui de cet air si précieux !
Les hommes se croyaient en guerre mondiale contre ce « minuscule » indomptable ?
L’interconnexion avec leur environnement ne pouvait maintenant simplement plus leur échapper !
Il se rappelait de la plus violente des façons mais fallait-il envisager cette épreuve comme une attaque ou comme un message :« l’harmonie est si fragile » ?
Il fallait bien sûr maintenant sauver des vies, redonner de l’air, ouvrir des espaces de respiration, desserrer les liens pour les sentir plus forts, donner ses richesses pour sauver les autres, ralentir le rythme pour entendre la vie...
La priorité était devenue : prendre soin, écouter, soutenir, se raisonner, freiner, agir pour le commun, apprendre la patience.
Le temps et l’empathie reprenaient leur place centrale.
Fallait-il entrer en guerre ou réaliser enfin qu’il fallait maintenant rentrer en paix et respect avec « notre nature » ?
Les hommes étaient contraints d'admettre profondément l’urgence à réécouter les siens, les autres hommes, comme lorsqu’on s’arrête pour le chant d’une mésange ou l’éclosion d’un crocus, entendre l’épaisseur d’un silence, d’une présence.
A l’unisson, tous accueillirent enfin avec reconnaissance dans leurs bourgeons, pétales, museaux, larmes, rosée, poumons, cet oxygène précieux qui les reliaient tous.
C.DUPUY
Mars 2020